10 févr. 2017

Maman, j'ai des questions à te poser sur Papy

Ça arrive comme ça, sans que l'on s'y attende... Ça nous poignarde sans y être prêts, nous fait même verser quelques larmes.

Un matin d'école, on s'affère dans la salle de bains pour s'habiller et se préparer. Fils entre et avec sa détermination habituelle me lance : " Maman, j'ai des questions à te poser sur Papy ".



Papy, c'est mon père. Il a choisit de quitter cette vie qui lui semblait insurmontable sans l'amour de ma mère, alors que je n'avais que 6 ans. J'ai toujours voulu être authentique à ce sujet avec mes enfants, Fils sait donc comment il est parti depuis qu'il a eu l'âge d'en parler.
J'emmène régulièrement ma petite tribu au cimetière, on regarde sa photo, on débarbouille la tombe, puis je reste parfois un petit temps seule en tête à tête avec lui. Je ne cache pas mes larmes, bien sûr je me retiens de ne pas m'écrouler par terre et de taper des pieds sur le sol (ce que je fais à l'intérieur), mais je pense qu'il est important que nos enfants voient que nous pouvons aussi avoir des faiblesses , et notamment le droit d'être triste après la perte d'un être cher.
Je fais mon possible pour que ce sujet délicat ne soit pas tabou, comme il l'a été pour moi dans "mon cocon familial". Ainsi je ne refuse jamais de répondre à ses questions, en y répondant du mieux que je peux, et en lui disant aussi que je ne sais pas quand c'est le cas.

Revenons à ce matin là.
Il m'a donc posé des questions qu'il avait déjà posées, d'autres nouvelles, demandé des précisions, des détails. Il se posait les questions que moi-même je me suis posées, alors que je n'avais personne pour y répondre à l'époque. Heureusement , depuis j'ai fais bougé les choses, j'ai soulevé des mouchoirs enfouis depuis une vingtaine d'années. Ça a été dur, éprouvant, et ce n'est pas terminé. Je n'ai pas toutes mes réponses, quelques une restent pour moi trop floues, j'essaye d'accepter que certaines de mes interrogations ne seront jamais éclairées.

Mais une chose est sûre, je ne renverrais jamais un de mes enfants avec une seule de ses questions en tête sans avoir tenté d'y répondre. Parce que j'ai trop souffert de mensonges et de tabous, parce que je sais que l'on peut parler de tout avec eux.
Même si ça fait mal, même si ce n'est pas le moment, même si ça met un coup de couteau supplémentaire dans une plaie qu'on peine tant à cicatriser. Ils ont le droit de savoir, c'est leur histoire autant que la mienne.
Et quand mon fils me dit qu'il est triste de ne pas voir son Papy "en vrai", même si je l'attrape en le serrant fort et qu'il voit l'émotion dans mes yeux, je sais que je fais ce qui doit être fait.

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